Le 27 mars, un orchestre symphonique composé d’étudiant·e·s, de permanent·e·s d’orchestre, de membres d’ensembles spécialisés, mais aussi d’amateurs et d’amatrices confirmé·e·s était réuni pour jouer deux des Tableaux d’une exposition de Moussorgsky, le second mouvement de la 7ème symphonie de Beethoven et El Pueblo unido de Sergio Ortega. L’orchestre a répété à 13h, et devait jouer à 14h.
Ce fut sans doute l’équinoxe de ce mouvement original et bizarre, qui a surpris par son développement et son écho. La situation était tendue : l’orchestre était en place, entouré de son public puis d’une ceinture de fourgons pleins de CRS, et il circulait parmi nous que le préfet Lallement menaçait d’évacuer la place et peut-être même le théâtre à la première note. On nous soupçonnait, ultime fourberie, de prendre le prétexte d’une manifestation contestataire pour déguiser un événement culturel.
Si ces soupçons étaient absolument fondés, ils illustrent toutefois bien le degré de loufoquerie où nous en sommes.
Il y avait de l’électricité dans l’air, et même un désaccord palpable parmis les mobilisé·e·s. Les occupantes et les occupants ne voulaient pas que Moussorsky soit un casus Belli, et que la trompette des Tableaux d’une exposition ne sonne la charge. Quant aux instrumentistes, ils ne voulaient pas, après s’être mobilisés de manière si spectaculaire, repartir le violon entre les jambes.
La tension a duré une bonne heure, meublée par les prises de paroles d’usage. Finalement, après semblerait-il des coups de fils « Hidalgo-Lallement », l’autorisation fut enfin accordée.
Pourtant l’Odéon était occupé depuis déjà près d’un mois et chaque jour avait été coloré de batucadas, fanfares, jazz bands, etc. Et ça n’avait jamais posé aucun problème. Mais qu’un orchestre symphonique puisse être revendicatif, le préfet ne pouvait pas l’entendre. Il a fallu l’intervention de la mairie de Paris et du gouvernement (!) pour que la préfecture daigne laisser l’orchestre jouer.
Et nous, les classiqueux du CNSMDP, on en pense quoi ? Est-ce qu’un orchestre symphonique, ça peut être revendicatif ? Ou est-ce qu’à jamais la musique classique est condamnée à être un faire-valoir de la culture bourgeoise ?